Appel du 1er Octobre 2013
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APPEL DU 1er OCTOBRE 2013
Pr. Gaston Mandata N’GUÉRÉKATA
Président du Parti pour la Renaissance Centrafricaine
P A R C
Mesdames et Messieurs les Représentants des Organes de Presse,
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs.
Permettez-moi tout d’abord de remercier les Banguissois et à travers eux, toutes les populations centrafricaines pour leur accueil combien chaleureux sur la Terre de nos Ancêtres. Je remercie en particulier mes anciens étudiants, mes amis, et les journalistes du monde entier qui couvrent cet événement.
Je suis né à Paoua le 20 Mai 1953, de père et de mère Centrafricains. Je suis donc un Centrafricain pure laine, d’origine modeste. J’ai commencé mon éducation par l’Ecole Primaire de Paoua, puis le Collège Moderne de Berbérati, le Lycée d’Etat des Rapides et Lycée Barthélémy Boganda de Bangui ou j’ai été reçu au Baccalauréat en 1972. Puis je suis parti au Canada poursuivre mes études universitaires jusqu’à l’obtention d’un Doctorat en Mathématiques. C’est dans ce pays que j’ai fait connaissance du Général André Kolingba, alors Ambassadeur de la RCA auprès du Canada. Rentré pour servir mon pays dès la soutenance de ma thèse, le hasard a voulu qu’une semaine après ma nomination comme Vice-Recteur de l’Université de Bangui par le Président David Dacko, le Général André Kolingba devenait Président de la République. Très tôt il a fait appel à moi pour entrer dans son Cabinet comme Chargé de Mission, puis Haut- Commissaire à la Recherche Scientifique et Technique. Je dois ici rendre hommage au Président Kolingba, homme épris de paix.
Je n’ai pas volontairement quitté mon pays en 1995 pour les Etats-Unis. A cause d’un électricien de l’Université devenu Ministre et à qui j’avais alors fait des remontrances d’ordre professionnel, il a été mis fin à mes fonctions de Vice-Recteur. Radié de la Fonction Publique, J’étais parti avec pour unique trésor dans mes bagages, quelques théorèmes que j’ai écrits sur les fonctions asymptotiquement presqu’automorphes et les équations d’évolution. Mon épouse, me rejoint quelque temps plus tard. A force de travail, elle décroche un poste permanent à la Banque Mondiale à Washington, D.C., tandis que je gravis de mon coté tous les échelons académiques pour devenir Professeur titulaire et Doyen Associé à la Morgan State University à Baltimore dans le Maryland.
Grace à ma famille, à mes amis ici et à vous les journalistes, vous qui avez si bien couvert les dérives de Patassé et Bozizé, j’ai pris conscience que je ne pouvais pas demeurer dans mon exil sans histoire aux Etats-Unis. Je crois avoir beaucoup donné à mon pays d’accueil par la formation d’une élite mathématique. Aujourd’hui, on me présente comme un des leaders mondiaux dans le domaine des équations d’évolution.
J’ai vu l’état du pays et de ma maison pillée le 21 Aout 2013, et je sais ce que vous avez tous souffert. Je m’incline devant la mémoire des victimes de cette terrible situation que Monseigneur Nzapalainga a si bien décrit comme du « jamais vu ».
Mais je ne suis pas venu me lamenter. Je considère que nous sommes un pays riche par la diversité de ses populations, son environnement, la richesse de son sol et son sous-sol. Et nous devons en être fiers. Nous avons une richesse linguistique qui nous permet, d’une part, de communiquer entre nous en sango, sur toute l’étendue du territoire, le sango, que j’ai eu l’unique privilège et le grand honneur d’introduire dans la Constitution Centrafricaine en 1990 comme langue officielle nationale; et d’autre part, avec nos voisins et la communauté internationale, le français langue officielle étrangère.
Non, je ne suis pas venu pleurer avec vous et tendre la main à la Communauté Internationale. Nos malheurs ne sont pas le fait des autres. Nous avons accepté le désordre et l’abaissement de notre pays jusqu’à ce qu’il soit devenu aujourd’hui, c’est- à-dire RIEN.
Ce n’est ni à Paris, ni à Bruxelles, ni à New York, ni à Washington, que l’on doit décider de notre avenir. Notre avenir nous appartient.
Cependant, j’ai conscience que nous aurions du mal à nous en sortir seuls et que nous ne pouvons accepter ni la soumission, ni la mise sous tutelle.
Sur les pas de Barthélemy Boganda, je me tourne vers la communauté africaine, et d’abord notre plus proche voisin, le pays le plus proche de nous, par l’histoire et la culture, c’est-à-dire le Congo, pour que nous construisions ensemble, un ensemble pérenne qui apporterait à nos ressources un débouché maritime. Cela ne peut se faire, et ne peut être acceptable qu’au sein d’un partenariat égalitaire, gagnant-gagnant.
Nous devons abandonner les chamailleries politiciennes. Pour un grand dessein, nous devons être unis et rassemblés. Nous avons su le faire en 1993 lorsqu’ à la demande du candidat Ange Félix Patassé, et avec l’accord de tous les autres candidats, le Président Kolingba a accepté de suspendre pendant un an le processus électoral et a créé un Conseil Présidentiel composé de tous les candidats à l’élection. Il s’agit de Abel Goumba, Ange Félix Patassé, Timothée Malendoma, Enoch Dérant Lakoué, Ruth Roland et André Kolingba.
Et dans l’unité nationale, nous avions organisé des élections républicaines et démocratiques qui ont vu l’élection non contestée de Ange Félix Patassé. Pour la première fois, un changement de Chef d’Etat s’est produit en RCA sans violence et sans mort.
Je ne rêve pas. Je me tourne humblement vers ce grand africaniste, Père de notre Nation, qui disait à l’époque : je suis né Congolais, j’ai été Oubanguien, et aujourd’hui, je ne sais plus ce que je suis.
Il semblerait que 54 ans après sa mort, cette phrase de Boganda, comme nombre de ses intuitions, soit juste et encore d’actualité. Oui, comme lui, je ne sais pas non plus ce que je suis : Oubanguien, Centrafricain, ou Congolais ?
Aujourd’hui 1er Octobre 2013, je lance un appel solennel à tous mes compatriotes, hommes politiques, paysans, cadres, éleveurs, étudiants, retraités, boubanguérés et wali gala, pour que tous ensemble, nous engagions la renaissance de notre pays.
Au désespoir doit succéder la foi et l’enthousiasme.
Pour ma part, j’abandonne mon exil américain. J’ai constaté que ma maison a été pillée. Je vais la reconstruire plus belle qu’avant et je me mets à la disposition de mon pays, à la place qui sera la mienne, pour œuvrer à sa reconstruction, dans l’esprit de Barthélemy Boganda.
J’apporterai mes moyens relationnels et financiers à la tache commune.
Je vous remercie.